[Paris], 10 mai 1980.
1 f. (145 x 210 mm), sur papier en-tête de la NRF, 3 rue Sébastien-Bottin, 75007 Paris, enveloppe conservée, timbrée, non oblitérée.
« Chère Madame,
Juste un mot pour vous dire que votre traitement a réussi. Je continue. Merci.
Amitiés, Romain Gary ».
Billet adressé par Gary à son médecin, le Docteur Lepêdre, dont le cabinet, au 2 rue de Narbonne, se situait à quelques dizaines de mètres de l’appartement de Romain Gary, rue du Bac.
Un mot a priori positif de la part de Gary, qui informe son praticien de la réussite d’un traitement, dont on peut penser qu’il est d’ordre psychologique. Les Cerfs-volants viennent de paraître : un 25e titre, en vingt-cinq ans, « pour la mémoire », puisque c’est à elle que le roman est dédié. Un roman plein de vie, et un roman testament. À sa suite, plus rien : Gary « traversait apparemment une phase d’impuissance créatrice […] Ses seules productions publiées pendant cette période sont des contributions liées à son passé de Français Libre [et] Gary ne va pas bien, ses angoisses ne le lâchent pas, la peur de la maladie, la peur de tout, la suspicion aussi, née de l’affaire Ajar, en même temps que la solitude lui pèsent : ‘Mon problème ce n’est pas de me fixer des horaires pour écrire, mais plutôt d’occuper les moments où je suis seul […] À 65 ans, je compte ce qu’il me reste à vivre non en années mais en livres’, avait-il livré dans une interview l’année précédente, en août 1979 » (Fabrice Larat, Romain Gary, œuvre et engagement, IEP de Paris, 1996, p. 76). Ce chiffre, dans les deux cas, le chiffre sera de un : six mois après la parution de son livre, et un an après cet mot prémonitoire, Romain Gary se suicide, le 2 décembre 1980.
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