Paris, Louis Broder, collection « Écrits et Gravures », n° 2, (24 octobre) 1956
1 vol. (185 x 250 mm) de 122 p.,  [8] et 2 f. + suite.
En feuilles, sous couverture illustrée, chemise et étui illustrée de l'éditeur.
Édition originale, posthume, du texte de Max Jacob considéré comme ses "Mémoires".
Illustrations de Pablo Picasso. 

Un des 170 exemplaires sur vergé de Montval (le n° 1),

celui-ci un des 30 premiers avec la suite du frontispice et des trois pointes sèches, ici tirées sur japon.
Il est joint le bulletin de souscription.
Max Jacob livre ici un témoignage, capital, de premier ordre, celui de ses souvenirs littéraires et artistiques de Montmartre. 
Il rencontre Pablo Picasso en 1901 à Paris et s'en suit une fraternelle amitié, qui fait de lui le témoin quasi quotidien du travail de Picasso, qu'il désigne comme son héros (aux côtés d'Apollinaire) lorsqu'il doit écrire sur l'époque de la rue Ravignan. À la mort du marchand Paul Guillaume, sa veuve lui demande une préface à un volume des mémoires de son mari : c'est ce projet qui est l'acte fondateur du texte et deviendra ce récit fondamental sur le cubisme : La chronique des temps héroïques. On y croise, outre Picasso et Apollinaire, les futuristes ainsi que les avant-gardes du XXe siècle. Arrêté et déporté à Drancy où il périra le 5 mars 1944, Jacob ne verra jamais la publication de ces lignes, si l'on excepte un fragment publié en janvier 1937 dans la revue Les Feux de Paris sous le titre : "Le Tiers transporté". Il n'existe pas de témoignage aussi vivant et direct que celui-ci sur l'aventure de l'art moderne, depuis la bohème montmartroise jusqu'aux frasques des années folles.
Cet exemplaire de tête (30 exemplaires) est enrichi d'une chemise illustrée comportant la même lithographie que l'étui, une suite de la lithographie du frontispice et des 3 pointes sèches originales, toutes tirées sur Japon ancien. Comme pour tous les 170 exemplaires de l’édition sur vergé de Montval, ils sont signés par Picasso à la justification. Il existe par ailleurs un unique exemplaire imprimé entièrement sur papier japon, celui de Louis Broder, avec les pointes-sèches signées, un dessin et des suites supplémentaires
En 1956, Picasso collabore à pas moins de dix livres, pour lesquels il donne une ou plusieurs illustrations originales. Des dessins originaux orneront ainsi les couvertures du catalogue raisonné Mourlot, Picasso lithographe III (Monte-Carlo, André Sauret) et celles de deux expositions personnelles : Picasso (Cannes, Galerie 65) et Picasso dessins d'un demi-siècle (Paris, Berggruen & Cie). Pour un autre type de livres, Picasso illustre le texte de Roch Grey, Chevaux de minuit, paru chez Iliazd, celui de René Crevel, Nuit, paru chez PAB, ainsi que deux ouvrages d'hommage pour trois de ses plus proches amis : Cocteau, Témoignage, chez Pierre Bertrand ; Éluard, Un poème dans chaque livre, chez Louis Broder et cette Chronique des temps héroïques, point final de trente ans d'amitié avec Max Jacob.
« Le projet deviendra ce récit fondamental sur le cubisme : La chronique des temps héroïques, commencée en 1935 dont seul le début parut du vivant de Max Jacob, en 1937. C'est en 1956 que Louis Broder en fera cette édition limitée, à l'occasion du quatre-vingtième anniversaire de la naissance du poète, avec des eaux-fortes de Picasso, d'après un manuscrit complet des huit chapitres. Le texte de cette édition n'avait jamais été repris depuis. Il n'existe pourtant pas de témoignage aussi vivant et direct sur l'aventure de l'art moderne, depuis la bohème montmartroise jusqu'aux frasques des années folles. »
Picasso y a créé 3 hors-textes, traités à la pointe-sèche, datés du 7 septembre 1956 (d'après le bon à tirer du frontispice) : elles représentent chacune Max Jacob écrivant, nu de dos ainsi que son profil, tête penchée. Picasso avait également fait un portrait de profil de son ami alors qu'il était à Vallauris, le 23 septembre 1953 - celui qu'il décida de retenir ici pour le frontispice de ce livre :  le bon à tirer de cette lithographie est daté « Cannes, 10.09.56 ». Pour la couverture et l'étui, Picasso créa deux autres lithographies originales en couleurs, puis ajouta 24 gravures sur bois, exécutées par Georges Aubert, d'après des dessins dans l'esprit des in-texte du Chef-d'oeuvre inconnu, le texte de Balzac que Picasso avait illustré en 1931 chez Ambroise Vollard.
« On peut affirmer que non seulement Max est le premier ami français de Picasso et qu'il va offrir libéralement à Pablo toute cette culture dont il est porteur, mais que, durant vingt ans ils vivront l'un à côté de l'autre, une amitié plus solide qu'on ne veut bien le dire, et toutes les ‘batailles', les grandes heures d'un art nouveau dont ils se veulent les chefs de file à commencer par le cubisme. »
Max Jacob (né en 1876) est celui avec lequel Picasso publie son deuxième livre illustré, le célèbre Saint Matorel, chef-d'oeuvre commandé par Henry Kahnweiler en 1911. Ils se sont rencontrés en 1901 à Paris, l'un venant de Quimper, sa ville natale l'autre tout fraîchement débarqué de Barcelone. Le poète a découvert le travail du peintre dans la galerie d'Ambroise Vollard qui expose pour la première fois le jeune Pablo Ruiz Picasso. Ce dernier et Max Jacob partagèrent une chambre boulevard Voltaire avant que le peintre ne s'installe rue Ravignan, à cette adresse devenue mythique : « Bateau lavoir », baptisée ainsi par le poète. Au numéro 7 de cette même rue, Max Jacob louera même un temps une petite chambre pour faciliter ses visites quotidiennes dans l'atelier de son ami. Au sortir de la guerre, c'est encore à Picasso qu'il demande de devenir son parrain de baptême (le 16 février 1918, à la chapelle Notre-Dame-de-Sion à Paris), avant que Picasso ne lui demande d'être son témoin de mariage avec Olga Khokhlova six mois plus tard, à l'église orthodoxe Saint-Alexandre-Nevsky. 
Douze ans après la mort tragique du poète, au camp de Drancy en 1944, Louis Broder permet à Picasso de livrer le plus bel hommage posthume qui soit, témoignage de cinquante ans d'amitié renvoyant aux premières heures de leur longue connivence. À soixante-quinze ans, Pablo Picasso oeuvre ici comme jamais pour le grand compagnon de ses débuts. 
Très bel exemplaire, le n° 1, du tirage de tête avec suite sur japon 
Goeppert-Cramer, Pablo Picasso. Les Livres illustrés, collection Steinhauslin. Genève, Cramer, 2006, p. 210, n° 78 ; The Artist and the Book, n° 238 ; Monod, 6297
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