Paris, Mercure de France, (10 septembre) 1912
1 vol. (110 x 180 mm) de 366 p., 2 et [1] f. Demi-maroquin rouge à coins, dos à nerfs, titre doré, date en pied, tête dorée, filets dorés sur les plats, couvertures et dos conservés (reliure signée de Montecot).
Édition originale.
Un des exemplaires du premier mille (n° 780).
Parmi ceux-ci, un des exemplaires du service de presse.
C'est le seul tirage numéroté, après les 19 exemplaires imprimés sur papier hollande. 
Exemplaire de choix, dédicacé par Pergaud à l'un de ses plus proches amis, Charles Callet.
Envoi signé : " à Madame Callet, à mon excellent ami Charles Callet, en toute affection, Louis Pergaud ".
Une petite photographie originale (son portrait) accompagne l'envoi, accompagné d'une longue note sur la dernière page.
Après des études classiques et les Beaux Arts, Charles Callet se mit à écrire : d'abord un volume de Contes anciens avec une étude sur Albert Samain, publié en 1905 chez Lemerre et préfacé par l'orientaliste Eugène Ledrain, un roman, Myrrhine, qui évoque l'Athènes antique, une étude sur son père Auguste Callet, que Pergaud, recommande en janvier 1909 à Léon Bocquet : "Avez vous reçu l'étude de Ch Callet sur son père ? Je vous la recommande. Cet excellent homme mérite qu'on s'occupe un peu de lui. Il y a d'ailleurs des choses fort intéressantes dans cette petite brochure" : Pergaud admirait, à vrai dire, l'oeuvre de Callet, de 26 ans son aîné, lequel le "conseillait, le guidait, le renseignait, fraternel". C'est à lui qu'il réserve, la première fois qu'il monte à Paris, sa première visite, en 1906. Callet le tirera de l'embarras à de nombreuses reprises, jusqu'à ce qu'un poste de professeur lui soit attribué, en 1909, et que le Goncourt de 1910 ne l'aide enfin à mieux vivre de sa plume.
Les deux hommes vont alors fonder, avec Léon Deubel deux revues poétiques : l'Ile sonnante et la nouvelle Athènes. Le chapitre IV de la Guerre des boutons emprunte, en dédicace de chapitre, cette phrase extraite des Contes anciens de Callet : " En ces temps, époque lointaine, merveilleuse...".
Lui écrivant, en 1911, Pergaud revendiquait le parfum de sous-bois, son adoration pour les livres, bien qu'il fasse « bon quelquefois, loin d'eux, se laisser tout doucement redevenir une brute harmonieuse ». La brutalité harmonieuse prendra une toute autre tournure à l'été 1914, lorsque les deux hommes sont mobilisés.
Mobilisé en août 14 dans l'armée française comme sous-lieutenant à Verdun, il servit en Lorraine sur le front Ouest. Le 7 avril 1915, son régiment lança une attaque contre les lignes allemandes ; blessé par balles, Louis Pergaud est enchevêtré dans les barbelés : on pense que les soldats allemands seraient venus à son secours, et l'auraient emmené avec quelques-uns de ses camarades dans un hôpital provisoire, situé à Fresnes-en-Woëvre, dans la Meuse. Cet hôpital devait subir le lendemain un intense bombardement de l'armée française et sera entièrement détruit. Son corps et ceux de ses camarades ne furent jamais retrouvés et Pergaud ne dispose toujours d'aucune sépulture.
Une stèle rappelle sa mémoire à Fresnes, tandis que deux villages, Landresse et Belmont, ont porté son nom chacun sur son monument aux morts ! Ultime hommage des deux communes à l'auteur de la lutte fratricide de La Guerre des boutons.
Charles Callet, heureux - si l'on peut dire - rescapé, sera nommé conservateur adjoint à la bibliothèque et musée de la guerre à partir de 1917, à Vincennes.
En exergue de La Guerre des ­boutons figure une apostrophe de Rabelais, le maître de Louis Pergaud : «Cy n'entrez pas, hypocrites, bigotz». Dans sa préface, l'auteur revendique sa volonté d'avoir fait un «livre sain», à la fois «gaulois, épique et rabelaisien où coulât la sève de la vie» qui, basé sur des souvenirs d'enfance, retrace les faits d'armes de deux bandes de galopins, l'une, menée par le grand Braque, du village de Longeverne, les autres, dirigé par l'Aztec des Gués du village de  Velrans. Le butin de guerre des deux armées, constitué de boutons de culotte et de lacets de souliers, sera sans cesse disputé, et férocement : « Il commença par la blouse, il arracha les agrafes métalliques du col, coupa les boutons des manches ainsi que ceux qui fermaient le devant de la blouse, puis il fendit entièrement les boutonnières, ensuite de quoi Camus fit sauter ce vêtement inutile ; les boutons du tricot et les boutonnières subirent un sort pareil ; les bretelles n'échappèrent point, on fit sauter le tricot. Ce fut ensuite le tour de la chemise : du col au plastron et aux manches, pas un bouton ni une boutonnière n'échappa..." 
Publié en 1912, le roman de Pergaud situait les beugnées forestières dans les années 1890, qu'Yves Robert, dans son adaptation au cinéma, déplaçera en 1962, témoignant en filigrane de la fin de la paysannerie et imaginant que Lebrac, pour échapper à une «fabuleuse raclée», s'enfuit et vit quelque temps dans les bois, poursuivi par la meute des honnêtes gens qui fait la chasse à l'enfant. Caché dans un chêne que les bûcherons abattent, il tombe en criant «Vive la liberté!». Placé en maison de correction, il retrouve L'Aztec et fait la paix. La République des Enfants décrite par Pergaud avait pressenti la fin de l'état de grâce : « Dire que, quand nous serons grands, nous serons peut-être aussi bêtes qu'eux.»
L'avènement de l'enfant-roi était alors bien loin et celui de la guerre - bien réelle celle-ci - arrivait. 
Emouvant exemplaire.

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