Paris, Éditions du Rocher, coll. « les infréquentables », (février) 1991
1 vol. (115 x 195 mm) de 135 pp., 1 et [4] ff. Broché.
Édition originale (sans grand papier).
Envoi signé : « Pour Max, à Paris, le 1er juillet 2000 ».
En 1991, Houellebecq entre à l'Assemblée nationale comme secrétaire administratif au service informatique, poste peu enchanteur, semblable à celui qu'il occupait auparavant au ministère de l'Agriculture, mais le statut de fonctionnaire lui assure désormais une sécurité matérielle propice à l'écriture. À cette époque, il a déjà publié, de manière confidentielle, quelques poèmes dans la Nouvelle Revue de Paris, dirigée par son ami Michel Bulteau, qui lui proposera, dans sa collection « les infréquentables » initiée aux Éditions du Rocher, de publier son premier livre, un essai sur l'auteur américain Howard Phillips Lovecraft, le maître du récit fantastique. Lecteur de l'auteur de L'appel de Cthulhu, de Dagon et des Montagnes hallucinées, à l'âge de seize ans, Houellebecq n'a jamais cessé de le lire. Tout autant une biographie qu'une analyse brillante de l'oeuvre du « reclus de Providence », Lovecraft contre le monde, contre la vie contient, en germes, les thèmes fédérateurs de l'oeuvre à venir chez Houellebecq : l'atomisation humaine dans la montée de l'individualisme, la nature comme force aveugle, la disparition progressive de toute forme de spiritualité, l'effritement des valeurs, la vanité d'une existence sans but, et le monde comme une jungle : compétition, combats, victoires et écrasements s'y succèdent, exposant une filiation d'écriture avec le poète qu'il est déjà et le romancier qu'il deviendra. Quelques traits cueillis au fil du texte disent mieux que de longs discours le ton du futur auteur d'Extension du domaine de la lutte : « on ne s'étonnera pas que Lovecraft n'ait guère éprouvé de sympathie pour Freud, le grand psychologue de l'ère capitaliste. Cet univers de ‘transactions' et de ‘transferts', qui vous donne l'impression d'être tombé par erreur dans un conseil d'administration, n'avait rien qui puisse le séduire. » Et en conclusion de son livre, Houellebecq rend hommage à Lovecraft poète : « L'oeuvre de sa maturité est restée fidèle à la prostration physique de sa jeunesse, en la transfigurant. Là est le profond secret du génie de Lovecraft, et la source pure de sa poésie : il a réussi à transformer son dégoût de la vie en une hostilité agissante. »
« Présentées ainsi, les choses paraissent presque simple. Et pourtant, les réussites sont rares dans l'histoire de la littérature. Ce n'est guère plus facile, en réalité, que de créer une nouvelle religion. » Et d'ajouter, en terme de conclusion devenue célèbre maxime, que « Howard Phillips Lovecraft constitue un exemple pour tous ceux qui souhaitent apprendre à rater leur vie, et éventuellement, à réussir leur oeuvre. Encore que, sur ce dernier point, le résultat ne soit pas garanti. »
Notons enfin la « brève bibliographie » en fin du volume et « classée par ordre de préférence » agrémentée de remarques personnelles remarquables de l'auteur. Dans la même collection paraîtra aussi Arthur Rimbaud et la liberté libre d'Alain Jouffroy, aussi en 1991 ; Baron Corvo, l'exilé de Venise de Michel Bulteau en 1990 ; Dashiell Hammett, Underworl USA de Jean-Pierre Deloux en 1994.

Le
Lovecraft de Houllebecq sera réédité en 2005 chez le même éditeur avec une introduction de Stephen King, traduction de sa préface à l'édition américaine.

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