Paris, Gallimard, [1937].
1 vol. (120 x 185 mm) de 318 p. et [1] f. Broché.
Édition originale.
Un des 30 premiers exemplaires sur alfa (n° 8), seul papier.
Dans la villa Les Tamaris qu’il a louée à Porquerolles, Simenon rédige pendant l’été 1936 celui de ses romans auquel il aura confié toutes ses espérances : sortir (enfin) du roman policier ; être reconnu comme écrivain à part entière afin d’être couronné par un prix littéraire – en l’occurrence le Goncourt pour lequel il est pressenti. Le Testament Donadieu, il le dit lui-même, est son « premier grand roman ». C’est peu dire que ce volumineux roman (750 pages tapuscrites) lui aura coûté. Au journaliste liégeois auquel il se confie pour L’Indépendance belge (5 décembre 1936), il révèle l’envers du décor : « Ce livre, je l’aurais peut-être produit plus tôt si j’avais été certain de soutenir l’effort nerveux et musculaire auquel je savais que cet ouvrage m’astreindrait. » Le travail nécessaire au Testament Donadieu, à la différence des romans précédents – par son envergure et la direction qu’il lui a fait prendre – est sans commune mesure avec la dizaine de jours que lui demande en général ses romans : « J’avais pu, jusqu’à présent, résister dix jours, mais il s’agissait, cette fois, d’un labeur d’un mois. Je suis sorti de cette tâche à demi-neurasthénique et il m’a fallu un traitement reconstituant […] ». Si grande est pour lui « l’horreur » de « la moindre correction » portée au manuscrit quand il est achevé : « comme je n’établis aucun plan, je ne pourrais que difficilement supprimer certains détails sans nuire à l’équilibre de l’ensemble. »
Simenon ratera de peu le Goncourt, malgré deux soutiens sérieux : Gaston Gallimard, auquel, lié désormais par contrat (depuis 1933), il allait donner en 1937 quatre textes (Faubourg, L’Assassin, Le Blanc à lunettes et Le Testament Donadieu), et l’un des jurés Goncourt, le turbulent Lucien Descaves. Ce dernier manœuvra beaucoup pour qu’un auteur étranger puisse recevoir ce prix, jusqu’à réussir avec le Liégeois Charles Plisnier couronné pour Faux-passeport. Simenon avait toutefois rempli sa mission : Le Testament Donadieu répondait selon lui « à une observation que l’on lui avait souvent faite. […] ‘Quand donc, demandaient les critiques, Simenon nous donnera-t-il ‘son’ livre ?’ ».
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