« Primauté de la peur »
Georges Bernanos

« Primauté de la peur »

[1929].
3 pages ½ en 4 f. (205 x 270 mm), encre bleue sur papier quadrillé.

 

Deuxième article de « Primauté de la peur » publié dans L’Action française du 19 décembre 1929 : une critique assassine d’À l’Ouest rien de nouveau d’Erich Maria Remarque.

C’est en 1929 que Remarque devient célèbre, grâce à l’énorme succès remporté par ce premier roman, À l’Ouest rien de nouveau. Traduit en vingt-cinq langues, l’ouvrage atteint en dix-huit mois un tirage de 3,5 millions d’exemplaires ! Le cinéma s’en empare immédiatement et, le 29 avril 1930, c’est la première aux États-Unis de l’adaptation cinématographique de Lewis Milestone. Le film sort le 4 décembre en Allemagne : des émeutes dans les cinémas sont organisées par Joseph Goebbels et les sympathisants du parti nazi ; le 11 décembre, le film est interdit en Allemagne par la Film-Oberprüfstelle, le comité de censure cinématographique de l’époque. Remarque devra fuir et s’installer en Suisse, à Ascona, tandis que ses livres seront brûlés par les nazis et que la nationalité allemande lui sera retirée. Il devra s’exiler aux États-Unis en 1939, tandis que l’une de ses sœurs, qui se cache, sera retrouvée par les nazis et décapitée en 1943.

C’est peu de dire que le roman ne trouve grâce aux yeux de Bernanos : « une bêtise trop pauvre, coriace », un « lyrisme prétentieux, cocasse, d’un sublime de chef-lieu de canton », d’une « parfaite insignifiance » : « Si l’héroïsme ici trouvait sa place, par miracle, il y paraîtrait suspect, une sorte de vice triste, à la fois frénétique et glacé, tel qu’on imagine la débauche d’un mauvais prêtre. Mais il n’y paraît pas, non plus que la lâcheté, son contraire. Ni braves, ni lâches. Rien que la monotone rumination de la peur, rendue supportable par la faim, le froid, l’épuisement. Et l’étrange réussite de ce livre est justement dans cette disproportion des circonstances tragiques aux êtres à peine pensants qui les subissent avec une passivité hideuse. Jamais on ne mit en face de la mort, sous le nom d’homme, un animal plus harassé […]. Disons-le d’abord : pas plus que l’Humanité de Marcel Cachin – les services de propagande de l’URSS –, ni les inoffensifs rédacteurs de la ‘Vie Intellectuelle’ ne tireront grand-chose du pauvre réalisme d’Ernest (sic) Remarque. L’immense succès d’un tel livre à travers le monde démontre assez d’ailleurs sa parfaite insignifiance. »

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