Poésie et Vérité 1942
Paul Éluard

Poésie et Vérité 1942

Paris, Éditions de la Main à plume, (3 avril) 1942.

1 vol. (110 x 130 mm) de [16] f. Broché.

Édition originale.

Exemplaire Noël Arnaud, avec son ex-libris.

Premier recueil de poèmes de résistance du poète et le dernier publié au grand jour, Poésie et Vérité 1942 est repris de Dichtung und Wahrheit de Goethe, dont a précisément paru début 1942 chez Aubier la première traduction intégrale par Pierre du Colombier, couronnée par la Société des gens de lettres. Lorsque la plaquette d’Éluard sera sous presse à l’automne, ce sera, en plus d’obvier à la nouvelle exigence faite aux imprimeurs depuis le 15 mai d’un aval indispensable pour l’obtention du papier, l’autre raison qui conduira à l’antidater au 3 avril 1942 : en faire une réponse-manifeste aux autorités d’occupation, moins discrète que celle de Claude Roy, auteur en août 1942 d’un poème intitulé « Poésie et Vérité » que publieront les Éditions de la revue Fontaine.

À l’automne 1941, Éluard est entré en contact avec le groupe surréaliste de la Main à plume (nom rimbaldien tiré d’Une saison en enfer : « La main à plume vaut la main à charrue ») et spécialement avec le jeune Noël Arnaud. Dès la fin octobre 1941, en effet, les deux hommes ont des projets communs, comme en portent trace les lettres et pneumatiques que le premier adresse au second dont la Bibliothèque de l’Arsenal conserve des photocopies pour les seules années 1941-1942. « Je pense à cette phrase de Montesquieu, qui pourrait nous servir, ne serait-ce qu’en citation, lui écrit-il alors : «Pour faire de grandes choses, il ne faut pas être un si grand génie : il ne faut pas être au-dessus des hommes ; il faut être avec eux» », maxime présente dans les Cahiers de Montesquieu que vient de publier Bernard Grasset au printemps et dont la presse se fait l’écho.

Depuis Vézelay où il demeure avec Nusch jusqu’à la mi-mars, Éluard écrit à Arnaud depuis l’hôtel du Cheval blanc : « la vie est plus facile ici qu’à Paris. Et ce pays est très beau sous la neige. Travaillez-vous ? […] Je resterai absent le plus longtemps possible. Écrivez-moi. » À son retour à Paris, Éluard reprend contact le 9 avril avec Arnaud pour publier des morceaux choisis de « Poésie involontaire et poésie intentionnelle » dans la prochaine parution de la Main à plume (lui ayant déjà donné un texte pour Transfusion du verbe édité en décembre) ; après bien des échanges et des difficultés, Poésie involontaire et Poésie intentionnelle paraîtra en juillet.

Ce qui occupe bientôt Éluard et Arnaud, sans doute dès le mois de mai lorsque le poète s’apprête à confier à Fouchet le manuscrit de « Liberté » / « Une seule pensée », c’est la publication de Poésie et Vérité 1942. Les deux hommes y travaillent, sans l’évoquer dans leurs brefs échanges épistolaires qui exigent parfois la discrétion d’un seul à seul : « voulez-vous me téléphoner ce soir tard ou demain matin très tôt. Il faudrait que je vous voie dans la journée », lui écrit le poète le 12 juin sur une carte pneumatique. De graves difficultés entravent en juillet les activités de la Main à plume, qui retardent l’exécution du projet, au point qu’Éluard songe parallèlement à une autre édition de Poésie et Vérité 1942 en zone non occupée ou à l’étranger comme il s’en ouvre à Parrot fin août : « Ce serait bien à Poésie 42, à cause du titre, ou aux éditions Charlot ? Sinon, en Suisse ? l’éditeur de Jouve ? ou à mes frais » (Scheler, p. 152). La plaquette sera finalement publiée en octobre par la Main à plume de Noël Arnaud, sises 11 rue Dautancourt, l’adresse personnelle d’Arnaud dans le 17e arrondissement, mentionnée sur la couverture.

Dès le 5 octobre 1942, Éluard adresse à Louis Parrot, en zone sud, cinq cents exem-plaires de Poésie et Vérité 1942 ; d’autres sont communiqués au peintre Cicero Dias à l’ambassade du Brésil à Vichy, qui les transmet à Roland Penrose, à Londres. Parrot en fait lecture à Clermont-Ferrand ; Gabriel Audisio à Marseille : « C’était un message d’espoir qui nous venait de l’autre zone, un message semblable à celui que les prison-niers parvenaient parfois à nous transmettre de leurs cellules. La R.A.F. en lança des milliers d’exemplaires dans toute la France » (Louis Parrot, L’Intelligence en guerre, p. 99). Bientôt traduit par Penrose, le texte connaît un retentissement extraordinaire à travers le « monde libre ».

Très belle provenance.

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