[Lyon, Impr. Nouvelle Lyonnaise, (déc.) 1943].
[Lille, Presses de la Silic, 1944].
1 vol. (145 x 225 mm) de 127 p. Broché, sous couverture verte imprimée.
1 vol. (140 x 225 mm) de 119 p. Broché, sous couverture verte imprimée.
Édition clandestine dite « de Lyon ».
Édition clandestine dite « de Lille », imprimée à la suite de la saisie de la première.
Début décembre 1942, Gallimard sort en librairie le roman dont le visa a été accordé moyennant la seule suppression des mots « Hitler qui a déclenché cette guerre démente ». Erreur de la censure ? La critique est enthousiaste et la presse “officielle” encense le livre. Mais début 1943 Je suis partout publie coup sur coup deux articles incendiaires de Robert Brasillach : « […] les poncifs les plus bavotants, l’éloge de la sainte démocratie, le culte de l’individu, […] on s’étonne qu’un tel bouquin, qui fleure bon l’esprit de juin 1936 ne porte pas sur sa page de garde le nihil obstat de Mandel et l’imprimatur de Blum ». L’effet de cette critique ne se fait pas attendre : le livre est instantanément interdit à la requête des autorités allemandes. À l’origine des éditions clandestines qui suivirent, il y a la rencontre entre Gaston Riby et Terre des Hommes. Profondément remué par ce texte, Riby débute avec l’auteur une correspondance que la guerre interrompt. Mobilisé, fait prisonnier, évadé, repris, puis finalement libéré, Riby fonde la Chaîne, une organisation d’entraide « pour tous les déshérités ». Sous couvert de cette association, il se livrera à différentes actions de résistance, dont la publication de cette première édition clandestine de Pilote de guerre, imprimée en décembre 1943 et tirée à un millier d’exemplaires.
Après quelques mois passés à Lille, la Chaîne installe son siège à Paris, dans le quartier des Halles. C’est dans ces bureaux que le 14 avril 1944 la Gestapo saisit les centaines d’exemplaires non encore diffusés, qui seront probablement détruits, ce qui explique la grande rareté de cette édition. Gaston Riby a le temps de lancer une nouvelle impression, depuis ses anciens bureaux lillois : de même format que la première, cette édition lilloise compte huit pages de plus en raison d’un caractère légèrement plus gros que le Cheltenham qui avait permis de réduire de moitié le nombre de pages par rapport à l’édition originale.
Ces deux éditions clandestines comprennent d’innombrables (et différentes !) erreurs (coquilles, omissions, phrases tronquées et corrections abusives), sous deux couvertures proches, mais différentes dans leur composition et le fleuron employé.
Riby, arrêté et déporté en juillet, passera plus de huit mois en camp dans des conditions particulièrement dures. Il aura pour compagnon de misère le mari de Marguerite Duras, Robert Antelme, qui témoignera du calvaire et de son héroïsme dans L’Espèce humaine.
Rare réunion de ces deux fragiles publications, que l’on rencontre habituellement en déplorable condition.
Il est joint, conservé dans l’exemplaire de l’édition lilloise, une coupure de presse du journal Témoignage chrétien du 24 décembre 1948 : la « Lettre aux hommes « , écrite très probablement le 7 juin 1943 alors que Saint-Exupéry effectue ses vols de formation sur le Lockheed P-38 « Lightning ». Cette fameuse lettre fut retrouvée dans ses affaires personnelles après sa disparition (31 juillet 1944). Contrairement à ce qu’on peut lire ici ou là, cette lettre n’est pas le dernier texte écrit par Saint-Exupéry, pas plus qu’elle n’est datée de juillet 1944 ; il apparaît donc comme abusif de la considérer comme le « testament » de Saint Exupéry, mais son contenu reste des plus intéressants. Le texte est d’abord publié aux Éditions Dynamo, à Liège, sous le titre Que faut-il dire aux hommes ? Lettre au général X…, avant d’être repris dans Le Figaro littéraire du 10 avril 1948, puis dans Témoignage chrétien sous le titre « Lettre aux hommes ».
Deux ex-libris ancien, l’un manuscrit, l’autre au tampon, sur chacun des volumes.
Icare, n° 96, pp. 31-41, 50-51.
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