Mémoires intimes
Georges Simenon

Mémoires intimes

Paris, Presses de la Cité, (octobre) 1981
1 vol. (155 x 240 mm) de 752 p. et [2] f. Broché, sous couverture illustrée.

 

Édition originale.
Premier tirage, complet des passages par la suite censurés.

Envoi signé : « Pour mon grand ami Claude Nielsen qui a eu le courage de se battre farouchement pour ce livre, en le félicitant d’avoir réussi envers et contre tous. Avec ma reconnaissance
et mon affection fidèle. Georges Simenon, 13 nov. 81 ».

La sortie des Mémoires intimes a été considérée comme l’événement de la rentrée littéraire 1981 : « Le livre a un parfum de scandale, et cela à trois égards : primo, il y est question de la sexualité de cet homme mondialement célèbre pour avoir déclaré, quatre ans plus tôt, lors d’un entretien avec Fellini au sujet de son Casanova, avoir fait l’amour avec 10 000 femmes ; secundo, certaines pages n’allaient pas manquer de faire réagir son ex-seconde épouse, Denyse Ouimet, qui obtiendra en effet, dès le 9 novembre, la suppression de plusieurs passages ; tertio, il y est question de l’événement le plus douloureux qui puisse bouleverser la vie d’un être humain : le suicide de son enfant, en l’occurrence de Marie-Jo Simenon, qui s’était donné la mort le 19 mai 1978, à l’âge de vingt-cinq ans. Sexualité, guerre des sexes et mort dans l’autobiographie d’un écrivain mondialement célèbre et bénéficiant d’un véritable battage médiatique ; les Mémoires intimes ne pouvaient pas passer inaperçus. » (Laurent Demoulin, « Simenon apostrophé », Textyles, 63 | 2022, 87-97).

C’est en 1979, à l’issue de sa 21e et dernière dictée, que Simenon décide de se lancer dans l’écriture de ses Mémoires intimes. Ce sera la plus volumineuse de ses oeuvres. Abandonnant sa machine et son magnétophone, il noircit à la main, entre février et novembre 1980, chaque jour de quatorze à vingt heures, 686 feuillets manuscrits d’une écriture très serrée. Dans le même temps, sous le pseudonyme d’Odile Dessane, Denyse Simenon-Ouimet, dont il vit séparé, publie Le Phallus d’or, où « toute ressemblance avec un ou des personnages ayant existé… [etc.] »

– indique l’avertissement. Comme dans Un oiseau pour le chat, publié en 1978, elle se défend d’avoir voulu régler ses comptes. « J’ai essayé simplement de donner à mon mari mythique une dimension humaine et lui rendre une chaleur qu’il est en train de perdre. » Elle y raconte les passions dévorantes du père de Maigret, sa tyrannie, et son semblant d’affection envers celle qui garda toujours le nom de Simenon : « [Il] ne veut pas divorcer. Et il me verse une pension équivalant au millième de ses revenus ». Mère de ses trois enfants (John, Marie-Jo et Pierre), elle refuse certaines lignes des Mémoires intimes, notamment celles où le romancier l’accuse d’avoir atteint à jamais le psychisme de Marie-Jo, et porte l’affaire devant les tribunaux.

Ce tirage princeps d’octobre ne fut mis en vente qu’une petite semaine : le 9 novembre 1981, le tribunal de grande instance de Paris ordonne le retrait des ouvrages et la suppression de plusieurs passages (31 lignes en tout, dont 25 concer- nant Marie-Jo) pour la nouvelle édition, laquelle doit être assortie d’une note de l’auteur (qui sera portée aux pages 495, 496, 719 et 721).

Les nouveaux tirages de novembre puis de décembre connaîtront une forte diffusion, augmentée en France par le succès de l’entretien exceptionnel que Simenon donnera à Bernard Pivot pour un numéro spécial d’Apostrophes, enregistrée chez le romancier à Lausanne et diffusé sur Antenne 2 le 27 novembre 1981. « Cet entretien, qui dure 1 heure 15, mérite peut-être d’être qualifié de ‘hors norme’. Non pas seulement parce qu’il a mis en présence un écrivain majeur et un journaliste populaire, mais parce que ni l’un ni l’autre n’y a joué sa partition habituelle et qu’aucun des deux n’use du code de l’interview d’écrivain tel qu’il se pratiquait à l’époque. » (Laurent Demoulin, op. cit.)

Précieux exemplaire : celui de l’éditeur de l’ouvrage, Claude Nielsen. Il avait repris les rênes de la maison d’éditions des Presses de la Cité à la mort de son père, Sven Nielsen, en 1977. Ce dernier avait rencontré en 1945 Georges Simenon : le début d’une très longue collaboration – et d’une amitié -, Simenon cédant en 1947 aux Presses de la Cité l’ensemble des droits d’exploitation littéraires de son oeuvre, au détriment de Gallimard. Jusqu’en 1981, les Presses de la Cité publieront 141 livres inédits de Simenon pour un tirage moyen de 300 000 exemplaires et une soixantaine de traductions, du japonais au bouriate.

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