Paris, Au Sans Pareil, coll. « Littérature », (10 août) 1919.
1 vol. (140 x 195 mm) de V, 32 p. et [4] f. Broché, non coupé.
Édition originale. Introduction d’André Breton.
Un des 10 premiers exemplaires sur japon ancien (n° 2).
Les Lettres de guerre constituent l’œuvre quasi complète de l’ami de jeunesse d’André Breton, qui eut juste le temps d’assister à la première des Mamelles de Tirésiasavant d’aller s’empoisonner à l’opium à l’Hôtel de France, place Graslin à Nantes, le 7 janvier 1919. Agent de liaison entre les armées françaises et britanniques, blessé en septembre 1915, Jacques Vaché fut hospitalisé à Saint-Dizier où il se lia d’amitié avec deux jeunes internes, André Breton et Théodore Fraenkel, les Lettres de guerre étant préfacées par le premier et dédiées au second.
Jacques Vaché était un extra-terrestre : toutes les exégèses parlent de son « suprême détachement », de sa capacité à observer notre monde avec une objectivité manifeste qui donne à ses textes une élégance naturelle à laquelle nul travail d’écrivain ne saurait atteindre. Florilège : « J’ai prévenu plusieurs fois un colonel à moi attaché que je lui enfoncerai un petit bout de bois dans les oreilles – Je doute qu’il m’ait entièrement saisi… » ; « Je suis avec les soldats anglais – Ils ont avancé sur la partie ennemie beaucoup par ici – C’est très bruyant – Voilà. », « Mon Dieu il fait chaud – Jamais je ne pourrai gagner tant de guerres ! » ; « Rien ne vous tue un homme comme d’être obligé de représenter un pays ». Ces superbes lettres, graves et légères, emplies d’humour, ont été écrites entre 1916 et novembre 1918, la dernière étant datée du 26 novembre, à peine plus d’un mois avant sa mort. Elles sont illustrées par un dessin de l’auteur représentant l’exécution de soldats par un officier, cigarette à la bouche et tête se détournant, et par un extrait en fac-similé de la lettre datée du 14 novembre 1918. Breton, responsable de cette édition – le troisième ouvrage de la collection « Littérature » publiée au Sans Pareil – confia que Jacques Vaché avait contribué à « détourner sa vie de son cours ». De celui qui lui avait révélé l’œuvre de Jarry, il écrivit : « Le temps que j’ai passé avec lui à Nantes en 1916 m’apparaît comme enchanté. […] Sans lui j’aurais peut-être été un poète ; il a déjoué en moi ce complot de forces obscures qui mène à se croire quelque chose d’aussi absurde qu’une vocation. » (Lettre à Jacques Doucet, 20 novembre 1920)
Précieux exemplaire de tête, en parfaite condition, non coupé.
De la bibliothèque Pierre Bergé (Vente IV, n° 931).
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