Les Immémoriaux

Victor Ségalen

Les Immémoriaux

Paris, Mercure de France, (24 septembre) 1907
1 vol. (120 x 185 mm) de 345 p., [3] et 1 f. Maroquin orangé, dos lisse, titre doré, tête dorée, date en pied, papier marbré serti d’un filet doré, tranches dorées, couvertures et dos conservés (reliure signée de M. de Bellefroid).


Édition originale.

Envoi signé : « À madame Rachilde, en tout admiratif hommage, ces histoires d’une race libre & inconventionnelle – autrefois. Max-Anély ».

L’exemplaire est enrichi d’une photographie, sous papier cristal légendé, représentant un dessin « offert à MM. les officiers du Transport-Aviso “La Durance” par un matelot du bord. Tahiti 12 août 1903 ».

Date importante s’il en est, puisque c’est ce même 12 août que Segalen découvre un objet maori important pour la suite, le tao mata, objet cylindrique tressé avec de la bourre de coco et prolongé par des cordelettes nouées servant à compter les générations successives. « Cette rencontre est primordiale. Dans un même lieu sont associées la découverte des généalogies et l’ombre de Paul Gauguin en la personne d’un Marquisien, Tioka, ami du peintre. Segalen ramènera une caisse contenant les dernières affaires de Gauguin et un tao mata […]. Les Immémoriaux s’écriront à partir de ce double héritage » (Étienne Germe, Segalen, l’écriture, le nom, Presses universitaires de Vincennes, 2001, p. 72).

Lorsque Victor Segalen publie ses Immémoriaux sous le pseudonyme de Max-Anély, seuls quelques initiés comme Huysmans, Gourmont, ou Loti connaissent l’auteur des études parues dans ‘Le Mercure de France’ : Les Synesthésies et l’Ecole symboliste, Gauguin dans son dernier décor, Le double Rimbaud.

Né à Brest, Segalen sera élève de l’École de médecine navale de Bordeaux avant de s’embarquer en 1903 comme médecin à bord de la Durance, qui fait escale à Tahiti pour deux ans. Le projet des Immémoriaux naîtra là-bas, alors qu’il recueille les derniers souvenirs de Paul Gauguin qui vient de mourir. Il découvre ses tableaux, ses écrits et les objets qu’il laisse derrière lui. De retour à Brest en 1905, Segalen composera son livre, consacré à la culture Maori, déjà honorée par Gauguin dans les pages de Noa-Noa.

En ce mois d’août 1903, trois mois après le décès de Gauguin, Victor Segalen va découvrir, depuis son port d’attache à Hiva-Oa, dans le district d’Atuona, le peuple et la culture Maori, un peuple insulaire dont l’activité migratoire est ancienne et dont la vision du monde se saisit dans l’émiettement des archipels. « Je t’ai dit avoir été heureux sous les tropiques, c’est violemment vrai. Pendant deux ans en Polynésie, j’ai mal dormi, de joie. J’ai eu des réveils à pleurer d’ivresse du jour qui montait. Les dieux du jouir savent seuls, combien le réveil est annonciateur du jour et révélateur du bonheur continu que ne dose pas le jour. J’ai senti de l’allégresse couler dans mes muscles. J’ai pensé avec jouissance. J’ai découvert Nietzsche. Je tenais mon oeuvre, j’étais libre, convalescent, frais et sensuellement assez bien entraîné. J’avais de petits départs, de petits déchirements, de grandes retrouvées fondantes. Toute l’île venait à moi, comme une femme. Et j’avais précisément, de la femme là-bas, des dons que les pays complets ne donnent plus. Outre la classique épouse maorie dont la peau est douce et fraîche, les cheveux lisses, la bouche musclée, j’ai connu des caresses et des rendez-vous, et des libertés qui ne demandaient pas autre chose que la voix, les yeux, la bouche et de jolis mots d’enfant. À Tahiti donc, j’ai sans geste précis connu des heures nocturnes radieusement belles. Les parfums s’y mêlaient sans doute, mais je sais fermement pourquoi j’y fus heureux. Je sais aussi que lorsque j’y retournerai pour vivre et y écrire mon maître du jouir, j’y retrouverai sous des espèces nouvelles, oh, pas de passion personnelle, d’analogue moment, ou bien je ne serais pas digne de sentir et de vivre » (in Lettre de Victor Segalen à son ami Henry Manceron, 24 décembre 1911).

La reliure de Micheline de Bellefroid a vraisemblablement été commandée par Raoul Simonson, pour son bon plaisir ; c’est également ce dernier qui a fait ajouter les deux documents en tête (reproduction et calque légendé).

Ce premier tirage des Immémoriaux contient bien, sous la justification, la « vignette Maori », qui caractérise les exemplaires des premiers mille. Nombre d’auteurs, au Mercure de France et à La Revue blanche, possédaient une « marque personnelle » (chiffre, monogramme) apposée à la justification des tirages courants des premières éditions.


Précieux exemplaire, envoyé et dédicacé à Rachilde, l’épouse d’Alfred Valette, le directeur du Mercure de France, là où Segalen fait publier ses Immémoriaux
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Exemplaire de choix, en parfaite condition.

Des Bibliothèques Raoul Simonson (Paris, Sotheby’s, 2013, n° 643) et Jacques Attali (Paris, Alde, 2018, n° 90).

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