Paris, Au Sans Pareil, [janvier] 1920.
1 vol. (198 x 132 mm) de 44 pp., plein papier pourpre, dos lisse avec longue pièce de titre de maroquin noir se rabattant sur les plats, titre doré en long, doublures et gardes de papier blanc, couverture et dos conservés (Reliure de Pierre Legrain, executée par Stroobants).
Édition originale.
Un des 555 exemplaires sur vélin d’Alfa (n°0309).
Envoi signé : “à André Breton, ce livre qui n’est pas fait pour lui déplaire, Paul Éluard “
Monté sur onglet : grand dessin original de Paul Éluard (250 x 197 mm) au fusain et crayons de couleur sur un double feuillet plié de papier Alfa mince au filigrane ‘Croxley’. Daté et titré dans l’angle inférieur gauche « Clowns à l’apéritif 1917 ».
L’on connaît une photographie d’Éluard et de Gala entourés d’amis et grimés en clowns (reproduite dans Éluard. Livre d’identité, p. 70-71), et ce dessin coloré et joyeux pourrait être un bel écho au mariage du poète avec Gala en février de cette même année 1917.
Dans une lettre à sa mère écrite au front, Éluard détaille les derniers préparatifs « Il faut faire homologuer l’acte de naissance de Gala […] acheter la robe blanche de Gala […] Le principal aussi serait de nous chercher une chambre calme, avec un excellent lit.[…] Je voudrais un vaste et haut et moelleux lit de campagne, massif, solide et doux, où nous vivrons et où nous mourrons. » (Lettres de jeunesse, 13 janvier 1917).
Ce précieux exemplaire a figuré dans le catalogue du libraire Jean Hugues, Poésie contemporaine. Picasso et l’art d’aujourd’hui (n°133), qui répertoriait les trois premiers recueils poétiques d’Éluard adressés à Breton. Sur Le Devoir et l’inquiétude Éluard inscrivait pour la première fois un envoi à Breton : « à André Breton pour les rares poèmes que je connais de lui », puis sur Poèmes pour la paix « à André Breton bien sympathiquement, 26-2-19 », pus, enfin, cet envoi sur Les Animaux et leurs hommes où se déchiffre déjà une connivence affective et littéraire “à André Breton, ce livre qui n’est pas fait pour lui déplaire, Paul Éluard”.
La réunion voulue dans cet exemplaire grâce au dessin d’Éluard est bien l’oeuvre de Breton lui-même, qui décide très tôt de le faire relier. Comme pour Le Devoir ou Les Malheurs des immortels, il porte l’indication manuscrite et signée de J. Anthoine-Legrain, précisant qu’elles sont les premières de Pierre Legrain, dites ‘reliures simples’.
Contemporaine de l’ouvrage, cette reliure est exécutée par Stroobants, comme les trois autres commandées par le poète au relieur. À cette époque Pierre Legrain est au début de sa carrière brève et fulgurante de relieur, qui débute en 1917 quand le collaborateur du décorateur Iribe, réformé parce que cardiaque, cherche auprès du grand mécène Jacques Doucet un travail. « Si vous me faisiez des reliures ?, lui proposera le mécène, Je me suis débarrassé de tout ce que j’avais d’ancien. […] À des livres modernes, je veux des reliures modernes. Jusqu’ici je n’ai trouvé personne pour m’en faire. » Si en 1919, il quitta le service de Doucet pour s’installer à son compte, l’un et l’autre restèrent très proches et Legrain continua de s’occuper des livres de la bibliothèques du mécène. Collection dont André Breton devait dès 1920 devenir le bibliothécaire attritré…
Provenance : André Breton (ex-libris dessiné et gravé par Salvador Dali) ; collection privée ; Daniel Sickles (indication du répertoire Legrain) ; Jean Hugues, Poésie contemporaine. Picasso et l’art d’aujourd’hui, n°13 ; Daniel Filipacchi (vente à Paris, 2005, lot 103, reproduit) ; collection privée.
Répertoire des reliures de Pierre Legrain, n° 285.
14372