L’Épervier de Maheux
Jean Carrière

L’Épervier de Maheux

Paris, Pauvert, (4 mai) 1972.
1 vol. (150 x 235 mm) de 364 p. et 1 f. Broché, non coupé, chemise et étui.

 

Édition originale.
Un des 50 exemplaires sur vélin pur fil (n° 7).

Envoi signé : « Pour Monsieur Large, cette tragédie sur du Sud, noire et sans Cigale, Jean Carrière ».

Lorsque les jurés du Goncourt choisissent de récompenser, le 20 novembre 1972, L’Épervier de Maheux au cinquième tour de scrutin, ils ne se doutent sûrement pas que ce livre va devenir le Goncourt le plus vendu de l’histoire : deux millions d’exemplaires achetés et quatorze traductions dans le monde ! Un immense succès, autant pour son auteur que pour le petit éditeur qu’est Jean-Jacques Pauvert, dont la réputation sulfureuse le tenait éloigné des récompenses.

Le roman se déroule dans un hameau imaginaire, Maheux, situé avec précision dans les hautes Cévennes. Ce pays, apparemment ingrat, Carrière le transfigure d’emblée par une description somptueuse du cours des saisons avec sa dureté et ses beautés, avec le poids de « l’oppression minérale », du silence et de la solitude oùl’homme vit durement dans une nature magnifique et impitoyable. Les anciens meurent, les fermes sont abandonnées les unes après les autres, les enfants quittent le pays : telle est l’atmosphère tragique d’une France anachronique qui meurt non loin de nous, décrite par un enfant des Cévennes de quarante-trois ans, encore peu connu et qui n’avait publié jusqu’alors qu’un premier roman, Retour à Uzès, resté confidentiel.

Ce roman régional et rural touche et le monde de l’édition, et le public. Dans Le Figaro, André Brincourt écrivait : « Jean Carrière tirerait plutôt fierté de ses parentages. Loin de les dissimuler il les exhibe, il prend place au soleil et se mesure aux grands noms : Ramuz, Giono, Bosco, Chamson » (22 juillet 1972). Jean Freustié et Matthieu Galey, dans Le Masque et la Plume du 26 novembre 1972, perçoivent quant à eux ce Goncourt comme « une espèce d’aventure métaphysique »  dans une écriture lyrique et musicale, « emphatique et belle » qui façonne un roman au-delà d’un simple récit sur la pauvreté de familles cévenoles.

Mais ce succès aussi colossal qu’inattendu est une « catastrophe » pour l’auteur, qui sombre dans une profonde dépression. L’enfant des montagnes ne supportera pas d’être catapulté auteur à succès et de devoir fréquenter Paris dans une aventure irréelle et féérique mais qui ne lui fait ressentir qu’un malaise intérieur. Les Cévennes, l’été suivant, deviennent à la mode : des hordes de curieux souhaitent découvrir les sites du roman ; dès le mois de mai 1973, plusieurs randonnées et un « Week-end sportif et littéraire au pays de Maheux » sont organisés. Les élus locaux manifestent officiellement leur mécontentement et les critiques pleuvent sur Carrière, qui n’est pourtant à l’origine de rien. Touché au plus profond par ces vives critiques qu’il reçoit de la part de ses compatriotes cévenols, il cessera d’écrire et reviendra sur cet épisode douloureux quinze ans plus tard dans Le Prix d’un Goncourt, mettant en épigraphe cette phrase de Borges : « Le succès est un malentendu, le pire de tous peut-être ».

Très bel exemplaire ; rare en grand papier et envoi.

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