S.l.n.d. [1980].
1 frappe originale (210 x 300 mm) de 15 f. chiffrés 2 à 15 et 1 copie carbone (210 x 300 mm) de 15 f. chiffrés 2 à 15.
Précieux et émouvant tapuscrit : c’est un chapitre alors inédit dans le texte français de La Promesse de l’aube. Ce long passage est en effet absent de l’édition originale de 1960 : il figurait en revanche dans la version anglaise parue en 1961 à New York, inclus à la demande de Gary à qui ce passage tenait à cœur. Il figure dans toutes les éditions publiées du texte aux Etats-unis, mais ne figure dans aucune des rééditions du texte en France avant celle de décembre 1980 – de fait, posthume de quelques jours.
Nous joignons les deux versions imprimées :
Ce chapitre – XXII – est presque entièrement consacré à sa mère, et à la figure de M. Zaremba, un artiste peintre polonais et riche client de la pension à Nice, qui s’éprend de la mère de Romain ; il ira jusqu’à demander au jeune homme la permission de lui demander la main de sa mère. Puis, passant outre le refus de ce dernier, se fera catégoriquement éconduire. Un passage important.
« Pourquoi ces modifications ? En écrivant dans une langue autre, il semble que Roman Gary se soit senti plus libre. Adresser des reproches à sa mère dans une langue autre que sa langue maternelle — langue choisie par la mère et non donnée, se déplacer dans un autre univers culturel ouvre une possibilité de dire autrement, ailleurs, ce qui n’a pas été entendu chez soi. Pour l’écrivain, cela permet aussi de réagir à chaud à la réception critique dans la langue originale d’écriture. L’étanchéité des mondes culturels français et américain de l’époque est une évidence pour Gary, et d’ailleurs, aucun critique dans les articles français consacrés à Lady L., Les mangeurs d’étoiles, Adieu Gary Cooper ou Charge d’âme ne fait allusion à l’existence de ces livres dans leurs versions originales anglaises » (in Romain Gary, l’impossible dérobade par Benoit Desmarais).
C’est le seul chapitre ajouté par Gary au texte initial, et la seule modification pour Promise at Dawn (huit mois après la publication française), qui paraît à New York à l’automne 1961. Monsieur Zaremba sera à nouveau évoqué en 1974 dans La nuit sera calme. Pour autant, le chapitre ajouté n’est intégré à aucune des rééditions successives du texte.
Mais en 1980, Gary souhaite – enfin – voir ce chapitre intégrer la version française, et demande aux éditions Gallimard non pas une réédition mais une “nouvelle édition”, qui sera titrée comme “version définitive” : elle sera publiée en décembre 1980… quelques jours après son suicide.
C’est – de fait – le dernier texte sur lequel Gary aura vraisemblablement travaillé, quelques mois après les Cerfs-volants, qui paraissent en avril. Ces ultimes corrections, conformes à l’édition publiée en décembre, ont sans doute été faites quelques semaines avant la mort de Gary, qui se suicide le 2 décembre. Une ultime demande – et non des moindres – que celle d’ajouter à son roman emblématique un passage qui l’est tout autant, et jusque là invisible pour le lectorat français.
La dactylographie comporte 11 corrections autographes à l’encre noire aux pages 6, 7, 8, 12 et 14 : ce sont essentiellement des corrections d’ordre orthographique et de ponctuation pour la plupart, ainsi que quatre ajouts | variantes. La copie carbone est celle d’une frappe postérieure où, sur le premier feuillet, Gary avait mentionné : « chapitre inédit en français de La Promesse de l’aube » ; chapitre « XX[II] ».
Précieux jeu d’épreuve : le dernier avant publication puisque toutes les corrections ici présentes sont conformes au texte publié.
Que Gary ne verra jamais.
Lectures de Romain Gary, p. 201 et 205.