Paris, Gallimard, 1941.
1 vol. (120 x 195 mm). Box noir à grain long, dos lisse, titre doré, décor sur les plats d’une arabesque selon l’axe vertical, faite de deux bandes mosaïquées de petits segments de veau gris et rouge vers la tête, gris et vert en queue, deux listels rouge et vert horizontaux ; motifs en filets or horizontaux et semis de petites étoiles blanches, doublures bordées de box gris et gardes de papier gris, tranches dorées sur témoins, chemise, étui (reliure signée de Paul Bonet, 1943).

Édition originale.
Exemplaire B parmi les 12 exemplaires de tête sur papier de Chine (seul grand papier).

Envoi signé : “Ex libris Paul Bonet En marge du plus beau travail : le sien Paul Eluard “.

Montés en tête :

– portrait photographique original de Paul Eluard, placé en frontispice et dédicacé au relieur : ” à Paul Bonet / son ami / Paul Eluard “, (182 x 114 mm) en tirae argentique sur papier “Agfa Brovira”.

– manuscrit autographe signé de Paul Eluard du poème ‘Sous l’angle d’or’ (44 vers sur 2 p. in-12, à l’encre noire sur papier vélin fin). Ce poème fut publié la première fois dans L’Arbalète (n° 5), à Lyon, au printemps 1942 ; il a été recueilli ensuite dans Le Livre ouvert, II (Paris, N.R.F., 1942), non loin du poème ‘Tant de livres’ dédié à Paul Bonet.

-Une couverture originale du “cartonnage Bonet”, imprimée aux fers sur simili-parchemin, signée au fer doré du relieur, pour le tirage spécial à 250 exemplaires dans ce tirage spécifique.

– La bande à parution originale et le prière d’insérer.

Le recueil est le premier ouvrage composite du poète, qui souhaite, pour la première fois, rassembler ce qui, à ses yeux, constitue le meilleur de sa poésie, depuis son premier recueil, Poèmes (en 1914), jusqu’au Livre ouvert (1941), en passant par tous les ouvrages importants du poète : Le devoir et l’ inquiétude (1917) ; Pour vivre ici (1918) ; Poèmes pour la paix (1918) ; Les animaux et leurs hommes (1920) ; Les nécessités de la vie et les conséquences des rêves (1921) ; Répétitions (1922) ; Mourir de ne pas mourir (1924) ; Capitale de la douleur (1926) ; Les dessous d’une vie ou la pyramide humaine (1926) ; Défense de savoir (1928) ; L’ amour la poésie (1929) ; A toute épreuve (1930) ; La vie immédiate (1932) ; La rose publique (1934) ; Facile (1935) ; Les mains libres (1937) ; Cours naturel (1938) ; Donner à voir (1939) ; Chanson complète (1939) et enfin Médieuses (1939).

A l’issue de cette parution, Paul Eluard rentre en clandestinité : d’abord à Vézelay, où il compose le poème Liberté, puis, définitivement, à partir de septembre 1942 et la parution de Poésie et Vérité 1942. Il ne donnera après-guerre que quelques recueils de moindre importance, en partie à cause du drame de la perte de Nusch, qui décède en 1947. Il lui survivra cinq années. De fait, Un choix de poèmes constitue la plus complète et la plus riche des anthologies poétiques d’Eluard, où figure l’essentiel de ses poèmes les plus célèbres et les plus importants.

Le recueil, pour Eluard, est d’importance, dès sa parution : publié par Gallimard à la fin de l’année 1941, il marque un peu plus la reconnaissance du poète, et celle du futur résistant : le 12 janvier 1942 Paris-Soir salue la parution du « Choix de poèmes, de Paul Éluard (N.R.F.), [qui] donne la juste mesure du talent de ce poète, qui est un vrai poète, un poète spontané, tour à tour sobre et tourmenté, un poète ardemment poète » ; le livre atteint deux mois plus tard Max-Pol Fouchet, qui s’enthousiasme dans L’Écho d’Alger du 25 mars : ” Choix de poèmes, qui vient de paraître, ruisselle d’extraordinaires beautés, de beautés qui exigent du lecteur une collaboration, une participation active s’il les veut pénétrer. Le simple et bel amour, l’enivrement de la passion, cette chaleur qui mue l’adolescent en poète et l’homme en adolescent, la sentimentalité gentiment expansive et bavarde, ce n’est pas cela qu’il faut chercher chez Éluard. Il poursuit, à la façon d’un Poë ou d’un Mallarmé, l’amour unique, l’inaltérable, le parfait.” Éluard a assurément gagné l’estime du public : « J’ai eu hier la surprise d’apprendre que le Choix de poèmes, tiré à 3 000, est épuisé » se réjouit-il le 26 juin. Un record, en moins de six mois, qui plus est en pleine occupation allemande.

A cette date, Paul Bonet est à Paris, affairé à ses reliures : il a en main, dès octobre 1942, quatre exemplaires sur chine du livre : le A, le B, le I, et le hors commerce I – celui de Paul Eluard. Il en entame leurs reliures immédiatement, à la suite voire en même temps, entre octobre et novembre, pour les terminer au cours de l’année 1943. La quatrième des reliures (cet exemplaire B), il en fait sienne : Paul Eluard – qui se cache alors chez Lucien Scheler, rue de Tournon -,  lui a confié un manuscrit d’un poème, ainsi qu’une belle photographie qui lui dédicace (c’est le seul des quatre exemplaires à la posséder), qu’il fait relier en tête. Le relieur y ajoute sa maquette pour la couvrure du cartonnage qu’il a réalisé pour le compte des éditions Gallimard – les fameux “cartonnages Bonet” (ou “Prassinos”, du nom de l’autre praticien). Sa reliure, exécutée par Lagadec et mise en dorure par André Jeanne, est terminée en novembre 1943, répertoriée dans ses Carnets sous le n° 636, avec cette mention : ” décor très léger et aérien “. Paul Bonet donnera, bien plus tard (1959), une cinquième et dernière reliure sur ce titre.

Les quatre premières reliures du Choix de poèmes sont toutes accompagnées d’une variation de la maquette de couverture du cartonnage N.R.F. dessinée par Bonet. Signalons que le cartonnage publié n’est pas signé : notre exemplaire prouve que c’est bien Paul Bonet qui en est l’auteur. Des cinq exemplaires reliés, celui-ci est le seul qui soit dédicacé. Après Paul Bonet, qui la conserva jusqu’à sa mort, il passa ensuite dans la collection de Daniel Filipacchi (Christie’s, 2004, n° 96), puis dans une autre grande collection française.

Exemplaire de choix et sans doute l’un des plus précieux des exemplaires de ce titre.
Celui de Paul Eluard ne contenait aucun manuscrit.

29895