Les Busclats, 8 octobre 1968.
1 vol. (170 x 215 mm). Reliure souple à la Vernier en veau naturel teinté violet estampé d’une eau-forte originale composée à partir des pages manuscrites de l’auteur, tranches dorées sur témoins à l’or blanc par Jean-Luc Bongrain, gardes de chèvre velours violet, chemise et étui entièrement bordé assortis, titre à la chinoise sur la chemise au film crème, par Claude Ribal (reliure signée de Louise Bescond, 2022).
Manuscrit autographe daté et signé.
A la suite, jeu d’épreuves définitif et bon à tirer, signé et daté par René Char de novembre 1969. Ces épreuves contiennent d’ultimes corrections autographes.
Il existe du Chien de cœur un autre manuscrit, dit “de travail” (Artcurial, mars 2014, n° 333), en partie d’une autre main ou sur feuillets dactylographiés – Char étant encore alité au début de l’été lorsqu’il entreprend l’écriture des premiers poèmes, tous composés entre juin et août à l’exception d’Outrages, composés par bribes entre 1944 et 1967. Notre manuscrit est à l’évidence la version mise au propre du jeu de travail, composite et afin de constituer les épreuves à venir.
Le manuscrit est offert à Anne Reinbold :
« Les Busclats 8 octobre 1968 – Pour Anne, Anne ma présente. René Char ».
Il présente d’importantes variantes par rapport à l’édition qui sera imprimée chez Guy Levis-Mano en janvier 1969. Six mois plus tôt, en mai 1968, à l’écart des événements qui secoue la France, René Char fait une crise cardiaque, première d’une longue série d’accidents cardiovasculaires. Il évoque cette “expérience” dans le texte liminaire qui ouvre le recueil : « Dans la nuit du 3 au 4 mai 1968, la foudre que j’avais si souvent regardée avec envie dans le ciel éclata dans ma tête, m’offrant sur un fond de ténèbres propres à moi le visage aérien de l’éclair emprunté à l’orage le plus matériel qui fut. Je crus que la mort venait, mais une mort où, comblé par une compréhension sans exemple, j’aurais encore un pas à faire avant de m’endormir, d’être rendu éparpillé à l’univers pour toujours. Le chien de cœur n’avait pas geint ».
Le recueil donne ensuite à lire six poèmes, tous composés pendant l’été, aux Busclats, juste avant l’arrivée de Martin Heidegger qui sera accueilli par René Char, fin août. René Char et Anne Reinbold habitaient ensemble dans la propriété du poète de 1965 à 1985, que le poète transforme à deux reprises pour l’agrandir. L’exemplaire contient en fin, dans les épreuves, quelques corrections, principalement d’ordre typographiques, et quelques légères variantes au texte ; un paragraphe prévu pour clore le recueil est également biffé, et qui n’apparaîtra pas dans le volume imprimé : « Maintenant que nous sommes délivrés de l’espérance et que la veillée fraîchit » : ces vers sont d’importance, puisque Char les conservera pour les intégrer dans son dernier recueil, Les Voisinages de Van Gogh (1985), enrichi d’un vers supplémentaire :
“Maintenant que nous sommes délivrés de l’espérance et que la veillée fraîchit, nul champ sanglant derrière nous, tel celui que laisserait un chirurgien peu scrupuleux, au final de son ouvrage.”
Ce poème viendra clore le recueil et constitue le tout dernier vers publié de Char, quelques mois avant sa mort. Le poète, vingt-cinq plus tôt, avait décidé de ne pas les conserver pour clore Le Chien de cœur. L’heure n’était, en 1968, pas venue… Le tirage du Chien de cœur se limite, pour les exemplaires sans la lithographie originale de Miro, à 790 exemplaires sur offset Roberstsau. Le tirage numéroté avec une lithographie en couleurs de Joan Miro, signée, constitue le tirage de tête : 95 exemplaires sur vélin d’Arches et six exemplaires sur vélin gris (I à VI) ; il existe en outre 15 exemplaires hors commerce sur divers papiers colorés : 7 vergé rose (A à G) et 8 sur vélin vert (H à O).
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