Carte à Bernard Quilliet
Georges Perec

Carte à Bernard Quilliet

[Chateauneuf-en-Timerais, septembre 1955].
1 carte postale (140 x 90 mm), encre noire, timbre et cachet.

” Retrouvant sous mes pas des senteurs d’Asphodèles,
Je cherche éperdument un “Deutique” binaire,
Sur l’albe immaculée d’un velin Caravelle
Des mots mallarméens entrechoquent leur nerfs…
Voilà qui vaut Pibrac ! Amitiés, Georges “.

 

” En littérature, Perec adolescent s’adonna aussi à la poésie. Avant 1957, rares sont les lettres ou cartes postales de lui sans mauvais quatrain ou un alexandrin boiteux ” (Bellos, p. 103). En voici un exemple, envoyé à son ancien condisciple d’hypokhâgne, Bernard Quilliet. Perec a choisi une carte postale représentant l’église de Blévy, où il se trouve en ce mois de septembre 1955.

Un matériel rare, rescapé de cette période, et l’un des plus précoces. Bernard Quilliet, c’est celui avec qui Perec a partagé son année scolaire, en hypokhâgne à Louis-le-Grand. Il l’a quittée en juin, et passe, à partir de la mi-juillet, son été à Blévy, une petite commune d’Eure-et-Loir, non loin de Dreux. C’est là-bas que David et Esther Beinenfeld, oncle et tante et tuteurs légaux depuis 1945, ont acheté en 1951 une maison de campagne. Perec passera ainsi la majeure partie de ses petites et longues vacances scolaires dans le Thymérais ; une maison dans laquelle il continuera de se rendre ensuite : c’est là-bas qu’il tapera à la machine, pendant les vacances de Pâques de 1974, la rédaction finale de W ou le souvenir d’enfance et qu’il la lut, chapitre par chapitre, à sa tante bien aimée, ” alors qu’elle se reposait dans un fauteuil à l’ombre des arbres du jardin. Ela [sa fille] était présente aussi. Après avoir écouté de très belles pages, elle prononça, pour que sa mère l’entende bien : ” Maintenant, il est vraiment écrivain ” ” (Bellos, p. 404).

Pour l’heure, en septembre 1955, Perec n’en est pas encore un : son hypokhâgne s’est soldée par un échec et, en ce mois de septembre, il attend la rentrée universitaire d’octobre puisqu’il a réussi en juin son examen de propédeutique – l’examen commun à tous les étudiants en lettres en fin de préparatoire leur permettant d’obtenir une équivalence et d’entamer une licence. Il choisira l’Histoire sur les rangs de la Sorbonne.

Avec Quilliet, il a beaucoup tenté dans l’écriture : plusieurs tentatives de pièces de théâtre, avortées ; une bande-dessinée, pour laquelle Perec ne terminera pas les dialogues. Ses premiers véritables essais littéraires, c’est avec Quilliet que Perec les fait.

Sa soif d’écriture, en cette rentrée 1955, ne semble pas étanchée. Le bizut écrit au bica ces vers presque nostalgiques, où Perec, depuis plusieurs mois et sur le papier à petits carreaux de la marque “La Caravelle” des années cinquante, cherche ses mots, cherche sa voie, en appelant ici à Guy Faur de Pibrac, magistrat poète du XVIe : c’est évidemment Quilliet qui lui a fait découvrir ce dernier, lui qui ne cessa d’attirer l’attention de Perec sur ces auteurs dont il raffole. Et dont il ne se détournera jamais plus puisqu’il deviendra l’un des meilleurs spécialistes du seizième siècle français, professeur émérite d’histoire moderne à l’université Paris VIII.

Les lettres de jeunesse de Perec en circulation sont particulièrement rares. La seule correspondance précoce privée, celle adressée à Jacques Lederer, débute au 15 février 1956.

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