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Jean Cocteau

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Paris, Gallimard, (juin) 1941. 
1 vol. (120 x 190 mm) de 89 p. et [1] f. Broché. 

Édition originale.
Un des 75 exemplaires sur alfax Navarre, celui-ci parmi les 10 hors commerce
(n° XVIII). 

Envoi signé : « à mon très cher André Gide, Jean ». 

Les rapports entre les deux hommes s’étaient envenimés au moment de la parution de Potomak, en 1919, lorsque Gide s’en était pris aux poèmes du Cap de Bonne Espérance : « Il m’appela comme un élève en faute chez le maître d’école, et me lut une lettre ouverte qu’il me destinait. On m’adresse pas mal de lettres ouvertes. Dans celle de Gide, je figurais en écureuil, et Gide en ours au pied de l’arbre. Je sautais des marches et de branche en branche. Bref, je recevais une semonce et je devais la recevoir en public. Je lui déclarai qu’à cette lettre ouverte je comptais répondre. Il renifla, opina du bonnet, me dit que rien n’était plus riche, ni plus instructif que ces échanges. On se doute que Jacques Rivière refusa de publier ma réponse dans la N.R.F. où Gide avait publié sa lettre. Elle était assez rude, je l’avoue. J’y constatais que la maison de Gide, villa Montmorency, ne regardait pas en face, que ses fenêtres donnaient toutes de l’autre côté ». 

À cette « Lettre ouverte à Jean Cocteau » parue dans La NRF en juin 1919, Cocteau répliqua dans Les Écrits nouveaux de juin-juillet : « Il y a en vous du pasteur et de la bacchante ». Nouvelle riposte de Gide dans la même revue en octobre, lui reprochant « non point tant de suivre, que de feindre de précéder ». 

La rivalité intellectuelle et l’estime distanciée durera tout au long de la vie respective des deux hommes, au cours de laquelle ils se croisent aux éditions Gallimard et dans les dîners en ville, notamment chez les de Noailles. Cocteau y reviendra dans son Journal d’un inconnu : « J‘aimais Gide et il m’agaçait. Je l’agaçais et il m’aimait. Nous sommes quittes. […] Au terme de sa vie, il vint dans ma maison de campagne avec Herbart. Il souhaitait que je fisse la mise en scène d’un film qu’il tirait d’Isabelle. À l’œil d’Herbart, je devinai qu’il pataugeait. Le film était médiocre. Je le lui expliquai dans une note écrite, et qu’on attendait plutôt de lui un film des Faux-Monnayeurs, ou des Caves. Il jubilait de m’entendre lire une note. Il empocha cette note. Il est possible qu’on la retrouve dans quelque tiroir. Nos contacts furent agréables jusqu’à sa fin, jusqu’à la lettre où Jean Paulhan me le décrivait comme pétrifié sur son lit de mort. » 

Gide, dès août 1914, avait marqué ses distances : « Jean Cocteau m’avait donné rendez-vous à un ‘thé anglais’ au coin de la rue de Ponthieu et de l’avenue d’Antin. Je n’ai pas eu de plaisir à le revoir, malgré son extrême gentillesse ; mais il est incapable de gravité et toutes ses pensées, ses mots d’esprits, ses sensations, tout cet extraordinaire brio de son parler habituel me choquait comme un article de luxe étalé en temps de famine et de deuil […]. Il y a chez lui l’insouciance du Gavroche ; c’est près de lui que je me sens le plus maladroit, le plus lourd, le plus morose ». 

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