Paris, Bachelin-Deflorenne, (20 mai) 1868.
1 vol. (105 x 155 mm) de 1 f., VI-152 p., [1] et 1 f. Broché.
Édition originale. Eau-forte de Staal en frontispice.
Tirage à petit nombre sur vergé, après quelques exemplaires sur vélin et un exemplaire unique sur peau de vélin.
En 1868 alors que France collabore à quelques journaux et revues, son père adresse à l’un de ses amis le premier livre de son fils, un opuscule sur Alfred de Vigny, assorti d’une lettre. Le ton est d’abord sévère … « n’ayant pas suivi mes conseils, il n’a point de situation. Il écrit… je devrais dire il barbouille du papier. Ce que je redoutais le plus depuis son enfance, par une fatalité, est arrivé. Il a toujours été absorbé par cette idée qui lui a fait perdre la tête. » (28 août 1868 à son ami Bossange). Cependant le ton de sa lettre change in fine et l’on décèle derrière cet agacement la simple inquiétude paternelle nourrie d’expérience et la tendresse… Sans doute quelque déception aussi.
Quelques années plus tôt, le libraire France chargé par les dispositions testamentaires de son ami défunt, le célèbre bibliophile comte de La Bédoyère, de l’inventaire de sa collection révolutionnaire (vendue pour la somme de 90.000 francs à la Bibliothèque Nationale) a sans doute fait appel à la ‘plume’ de son fils pour en rédiger la préface. Son aisance de style, son érudition nourrie dans la librairie paternelle depuis son enfance, les relations qu’il avait naturellement liées avec le monde des lettres ont en effet laissé imaginer à son père que le fils reprendrait son commerce où il pourrait exceller davantage que lui dont le parcours moins ‘académique’ avait dû certaines fois compliquer son travail.
Mais France lorgnait plutôt du côté de la fonction publique et attendra encore presque dix ans un poste à la Bibliothèque du Sénat. Sans doute cela convenait davantage à l’esprit rêveur et nonchalant qui était le sien. Pour l’heure son premier livre venait de paraître – après une publication devenue très rare qui fut composée alors qu’il était encore au collège Stanislas, La Légende de sainte Radegonde.
Son Alfred de Vigny, outre quelques exemplaires sur vélin, avait été imprimé à un unique exemplaire sur peau de vélin (coll. Louis Barthou) où France nota plus tard : « Ce petit ouvrage remonte à un temps où je ne savais ni écrire, ni travailler. Il est le pitoyable monument de ma frivole jeunesse. »