S.l.n.d. [Paris, 1937]
1 affiche (425 x 255), impression en noir sur papier fin jaune, avec dédicace autographe à l'encre en pied, encadrée.
Affiche originale d'Oedipe-Roi. 
Elle est dédicacée à Jean Marais, qui signe là son premier rôle.
Elle fut réalisée pour les 15 représentations du gala des « jeunes comédiens 37 » au Théâtre Antoine. Le premier rôle sur les planches de Jean Marais, qui marque le début de la longue histoire entre les deux hommes. 
Envoi signé : « à mon cher petit Jean qui m'a donné le courage de monter Œdipe --- Jean [étoile] »
Jean Marais avait beau encore le répéter, en 1997 : « le théâtre est ma véritable passion. Depuis mes débuts, je n'ai jamais cessé d'en faire », sa carrière sur les planches reste en deçà de sa réputation. On ne le retrouve ni à la Comédie-Française ni au TNP ni dans aucune des aventures marquantes des années 1950 et 1960 (Beckett, Ionesco, Camus ou Genet). En fait, une fois de plus, l'essentiel se confond avec Cocteau. 
C'est au cours de Dullin que Cocteau rencontre Jean Marais. Fasciné par la beauté de ce personnage, qui lui rappelle les portraits qu'il dessine depuis près de vingt ans, il l'engage immédiatement pour jouer dans la pièce qu'il prépare : OEdipe Roi, adaptation libre de l'oeuvre de Sophocle. La tragédie en un acte, restée dans un tiroir depuis plusieurs années, doit être représentée lors de l'Exposition internationale de juillet 1937, au Théâtre Antoine, dans une mise en scène de Raymond Rouleau et interprétée par une troupe de comédiens débutants. Jean Marais n'y est alors que remplaçant, mais Cocteau, qui assiste aux éditions, décide de l'imposer. Lui, ou personne. Cocteau, à la première, prononce une allocution : « Le groupe des jeunes comédiens 37 assume, avec la confiance superbe de l'extrême jeunesse, la tâche de jouer coup sur coup les deux drames les plus atroces que je sache (...) ». Cocteau est ému, chaque soir, de la prestation de Jean Marais : « on le sanglait dans ses bandes, semblable à un grand blessé, à une momie. Je crois que ces longs préparatifs et cette longue station sur un ring de boxe lui furent une bonne école puisque, par la suite, patience et lutte ne lui firent jamais défaut ». Le spectacle, annoncé pour une semaine, tiendra trois semaines, à partir du 12 juillet 1937, dans des costumes de Cocteau avec des tissus de Coco Chanel : « certains de ses tissus étaient composés de métaux assemblés, articulés, mais d'un tel poids ! Pour mon compte, j'étais habillé - si j'ose dire - de bandelettes blanches comme un grand blessé. En fait, j'étais quasiment nu »
L'amour de Cocteau envers son protégé - un véritable coup de foudre - l'aide à monter sa pièce, donnant l'occasion à l'un et à l'autre de se surpasser. Deux semaines plus tard, dans la chambre de l'Hôtel de Castille, Jean Cocteau offre à Jean Marais le premier rôle pour sa future pièce, Les Chevaliers de la Table ronde, puis lui déclare officiellement son amour : « Il y a une catastrophe... Je suis amoureux de vous (...) Je sais maintenant le mal dont je souffre et que je traîne : c'est toi. C'est vivre sans toi. Je te cherche partout comme un pauvre chien aveugle et je me couche pour une minute (...). Comment te remercier de ce miracle. De cette étoile sous laquelle tu marches et qui est une vraie étoile à côté de mon étoile écrite. »
L'histoire entre les deux hommes durera toute une vie, pendant près de 25 ans, jusqu'à la mort de Cocteau en 1963. L'affiche, quant à elle, n'a été reproduite et citée qu'une seule fois, lors du décès de Jean Marais, en novembre 1998, dans un article de Libération, dont une copie figure au verso de l'encadrement. 
Témoin inaugural d'une des rencontres artistiques majeures du XXe siècle.
Jean Marais, Histoires de ma vie, 1975, p. 59.
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