Paris, Chamuel, 1894
1 vol. (120 x 190 mm) de 68 p. et [1] f. Bradel papier, titre en long sur pièce de titre, couvertures conservées (reliure légèrement postérieure).
1 vol. (120 x 190 mm) de 68 p. et [1] f. Bradel papier, titre en long sur pièce de titre, couvertures conservées (reliure légèrement postérieure).
Édition originale.
Envoi autographe signé au faux-titre :
Envoi autographe signé au faux-titre :
« à Émile Zola, Léon Bloy, profondément honoré d'avoir été contraint de donner à la caisse du 'Gil Blas', pour l'auteur de 'Lourdes', la somme futile de deux mille quatre cents fr. prélevée sur le pain de sa femme et de ses enfants ».
Exemplaire enrichi de corrections autographes et de passages soulignés à l'encre et au crayon de couleur pages 9, 30, 31, 50, 55.
Adversaire implacable de l'école réaliste et naturaliste, Bloy fit pourtant l'éloge de Zola, sous le titre « Antée », dans le Gil Blas du 21 janvier 1889 (« Pour ne parler que de L'Assommoir - l'un des cinq ou six chefs-d'oeuvre du siècle"). Mais en septembre 1894, changement de ton : il éreinta Lourdes dans le Mercure de France, sous le titre « Le Crétin des Pyrénées » - formule des plus désobligeantes dont le déchiffrement donne à penser : c'est pour Bloy une façon de viser le matérialisme, qui fonde sa doctrine naturaliste sur la négation de l'Esprit. Selon Bloy, des réalités humaines, l'auteur des Rougon-Macquart ne voit que la partie physique et reste aveugle à tout ce qui peut exister au-delà. Quand Fécondité paraîtra en feuilleton dans L'Aurore, en 1899, Léon Bloy n'aura pas varié, et s'indignera à nouveau devant les platitudes de celui qu'il appelle le « Crétin des Alpes » : reprenant ses arguments dirigés contre le roman, il publiera, quelque temps plus tard, un pamphlet, dont le titre est tout à fait significatif : Je m'accuse.
Depuis quelques années, Bloy est chroniqueur au Gil Bals, où il livre ses Histoires désobligeantes : une querelle opposant le journaliste Edmond Lepelletier et l'écrivain Laurent Tailhade met le feu aux poudres, et Bloy de prendre la défense Tailhade. Lepelletier le provoque alors en duel, mais Bloy répondit que ses convictions religieuses s'y opposaient. L'affaire ne s'apaisant pas, le Gil Blas décida de se séparer de Bloy. Le malheur s'ajoutant aux tracas, Bloy perd après-coup ses deux fils André et Pierre, tandis que sa femme tombe malade. Malheureux et ruiné, il s'empare de sa plume pour rédiger Bloy devant les cochons, constituant une sorte d'encyclique d'un excommunié. ''Tenez pour dit, mes petits mignons, que je subsiste pour vous embêter in aeternum. Vous aurez beau faire, vous ne parviendrez jamais à vous débarrasser de moi". Et de régler ses comptes avec Emile Zola, à qui il reproche d'avoir vendu les bonnes feuilles de Lourdes au Gil Blas : " J'ai payé deux mille quatre cents francs le dernier roman de M. Émile Zola. Ce travailleur sincère et bon, qui ne hait pas de profiter du travail des autres, daigna prélever, pendant un assez long temps, le trente pour cent sur le pain des miens. Je me suis paré de cette insigne décoration dans ma brochure : Léon Bloy devant les cochons, dont j'ai fait, d'ailleurs, ainsi qu'il convenait, l'hommage le plus empressé au vieux lion qui règne, à Médan, sur Paul Alexis, dans les environs de Poissy. On m'accordera, j'ose le croire, qu'une telle contribution me remplit du droit de parler, encore une fois, de M. Zola, fût-ce pour m'aplatir, comme une punaise, devant la majesté de ce receveur. Depuis environ deux ans qu'on annonça Lourdes, j'avais empilé chez moi de vieux journaux mentionnant diverses palabres du pontife, dont j'espérais une grande lumière. Hélas !"
Enfin, pour que le tableau soit des plus complets, ajoutons que l'ouvrage parut le jour même - 25 juin 1894 - de l'assassinat du président Sadi Carnot, ce qui fit déplorer à Bloy dans son "Journal" que ne fût pas choisi "un autre jour pour saigner ce porc" !
Exemplaire Bloch-Levallois, avec ex-libris.
Ancienne trace d'une mouillure en tête, fragile papier acide.
Thieme I, 237
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